Les inégalités sociales sont visibles dès les petites classes.  Peu ou prou, tous les élèves vont jusqu’en troisième, c’est ensuite que la composition sociale des filières change. Pour le mesurer, il suffit d’observer l’évolution de la part des enfants de cadres et d’ouvriers. Au fil des scolarités, les premiers sont de plus en plus présents, alors que les seconds le sont de moins en moins1.

Au collège, les enfants de cadres et d’ouvriers représentent la même proportion de l’ensemble des élèves (23 %), selon le ministère de l’Éducation nationale (données 2021-2022). Au niveau du lycée, les enfants d’ouvriers sont surreprésentés dans les filières professionnelles et techniques. Ils regroupent 32 % des élèves de CAP, six fois plus que les enfants de cadres. En revanche, en première et terminale générales, on compte plus de deux fois plus d’enfants de cadres (36 %) que d’ouvriers (15 %).

La baisse de la part d’enfants d’ouvriers se poursuit ensuite. Ces derniers forment 10 % des étudiants à l’université, 7 % dans les classes préparatoires aux grandes écoles et 2 % des élèves des écoles normales supérieures (parmi les plus sélectives des grandes écoles). Inversement, la part des enfants de cadres augmente : 33 % des étudiants à l’université, 53 % en classes préparatoires et 63 % dans les écoles normales supérieures (dites « Normale sup’ »). Alors qu’ils sont tout autant nombreux, les enfants d’ouvriers sont 30 fois moins représentés au sein de l’élite scolaire française.

Ces données illustrent la force des inégalités sociales à l’école en France. Il faut se garder des caricatures : le fait que les écarts entre milieux sociaux s’accroissent au fil de la scolarité ne signifie pas que l’école augmente les inégalités. Il existe en France de véritables filières de promotion sociale. En BTS par exemple, les enfants d’ouvriers sont aussi bien représentés (23 %) qu’au collège alors que leurs parents sont souvent loin d’être allés jusqu’au BTS. L’école tire une partie des élèves vers le haut de la hiérarchie sociale. Sans service public d’éducation, les écarts auraient une tout autre ampleur.

En revanche, comme le montrent ces données, notre système est loin de faire ce qu’il devrait pour assurer l’égalité des chances scolaires, essentiellement parce que la compétition y est très tendue, que l’école française laisse peu de place à l’expérience et qu’elle cherche à sélectionner quelques bons élèves plutôt que d’éviter d’en perdre un grand nombre en route.

Notes:

  1. Attention : ces données représentent la situation une année donnée, il ne s’agit pas du suivi dans le temps d’une génération d’élèves.