Si on le rapporte à la population, le solde migratoire oscille entre 10 et 20 personnes pour 10 000 habitants depuis 1970, sauf en 2018 où il a atteint un pic. L’arrêt de l’immigration de travail depuis près d’un demi-siècle a marqué une cassure, après vingt années de flux élevés1. Depuis 2017, on assiste à une progression, avec plus de 20 personnes pour 100 000 habitants par an.

Le solde migratoire est le résultat d’un ensemble de flux d’entrées et de sorties du territoire. Chaque année, des Français et des étrangers viennent s’établir sur le sol national ou le quittent. Les chiffres sont approximatifs, car on connaît relativement bien les entrées légales, mais on ne sait pas grand-chose des départs. L’Insee estime qu’en 2020, 215 000 immigrés se sont installés dans l’Hexagone, mais 46 000 sont repartis, d’où un solde de 170 000. En même temps, 100 000 non-immigrés sont partis vivre à l’étranger, mais 68 000 sont rentrés, soit un solde négatif pour notre pays de 30 000 personnes environ. La somme de ces flux d’entrée et de sortie donne un solde migratoire net de 140 000 en 2020 si l’on prend les données pour la France entière2.

À partir du milieu des années 2010, l’immigration a progressé. La France a accueilli davantage de réfugiés, par exemple du fait des crises syriennes et libyennes ou d’autres conflits en Afrique. Mais l’émigration augmente aussi. Les raisons fiscales n’ont guère d’impact à ce niveau. Il s’agit pour partie de Français qui partent à l’étranger pour étudier ou pour évoluer dans leur carrière. La mondialisation a des effets sur les scolarités et l’organisation des parcours professionnels. 80 % des départs de personnes nées en France surviennent entre 18 et 29 ans, selon l’Insee. En même temps, une partie des étrangers qui vivent en France finissent aussi par la quitter, pour revenir dans leur pays d’origine ou s’établir dans un autre pays.

Ces évolutions correspondent à l’insertion de notre pays dans une économie mondialisée, dans laquelle les personnes circulent plus qu’auparavant. Un nombre croissant d’habitants de la planète, pour de très nombreuses raisons, conçoit d’aller vivre dans un autre pays même si le phénomène demeure marginal rapporté à la population mondiale. Les crises politiques que vivent certains pays alimentent des flux temporaires plus élevés.

Logiquement ce mouvement a été stoppé en 2020 du fait de la crise sanitaire qui a entraîné une baisse très nette des flux d’entrées et de sorties. Le solde migratoire pour la France métropolitaine s’est stabilisé à 155 000 en 2021 comme en 2019, mais avec 100 000 entrées et sorties de moins. La réouverture des frontières devrait marquer un retour à des flux plus importants en 2022 car une partie des candidats à l’immigration ou l’émigration ont simplement reporté leurs projets. Une partie de la variation dépendra de l’accueil en France de réfugiés d’Afghanistan et surtout d’Ukraine. L’amélioration en cours sur le marché du travail va aussi jouer un rôle en attirant de nouveaux candidats. Le retour à un régime de croisière dépendra d’une stabilisation des conditions économiques, sanitaires, mais aussi de la géopolitique mondiale.

Notes:

  1. Le pic de 1962 étant lié aux rapatriés d’Algérie, le solde migratoire atteint alors 860 000 personnes soit 185 pour 100 000 habitants.
  2. Le reste de cet article utilise les données pour la France métropolitaine, les seules disponibles sur une longue période.