La population immigrée vivant en France1 est passée de 4 % à 10 % de la population en un siècle. Cette hausse s’est faite en trois grandes phases. Dans les années 1920, nombre de nos voisins (italiens et espagnols en particulier) fuient la misère et la France a besoin de bras pour combler les énormes pertes humaines dues à la Première Guerre mondiale2. Rapidement, une partie retourne ou est renvoyée chez elle, si bien qu’en 1946 la France ne compte plus que 5 % d’immigrés. Leur part a augmenté dans une deuxième phase de façon relativement constante dans l’après-guerre jusqu’au début des années 1970 où elle atteint à nouveau 7 %. La France a une fois de plus besoin de forces vives pour alimenter la machine économique, c’est l’époque des Trente Glorieuses.

L’arrêt de l’immigration de travail stabilise la part des immigrés jusqu’à la fin des années 1990. Mais à partir des années 2000, on entre dans une troisième phase : les immigrés représentent 10,3 % de la population en 2021. La persistance d’écarts énormes de niveaux de vie entre les pays et la permanence de conflits armés conduisent à une hausse des migrations internationales. La mondialisation accroît la circulation des femmes et des hommes pour les études, une mobilité professionnelle, rejoindre un conjoint, etc. La France demeure un pays moins accueillant que beaucoup d’autres pays riches, mais la progression de la part des immigrés a un impact sur notre démographie. La guerre en Ukraine, comme les conflits précédents, aura une répercussion.

Les immigrés sont des personnes nées étrangères à l’étranger. Certaines, implantées de longue date, deviennent françaises par naturalisation : elles ne sont alors plus comptabilisées parmi les étrangers. La population immigrée en France rassemble des personnes qui pour une très grande part sont établies depuis longtemps en France. Des données – malheureusement anciennes – indiquaient en 2011 que 70 % des immigrés étaient arrivés dans l’Hexagone depuis plus de dix ans (lire notre article sur la mesure de la présence des immigrés et des étrangers).

Les étrangers sont des personnes qui n’ont pas la nationalité française, mais dont une partie (environ 15 %) est née en France. L’évolution de leur part dans la population connaît quant à elle des mouvements d’oscillation autour de 6 % avec une progression plus nette dans les années récentes : la population étrangère en France atteint 7,7 % en 2021 et devrait augmenter avec le conflit ukrainien. Les années 1930-1940, puis 1980-1990, sont marquées par une baisse assez nette de leur part dans la population qui peut résulter d’une naturalisation ou d’un retour dans le pays d’origine, notamment de travailleurs. À leur majorité, une partie des jeunes nés de parents étrangers opte pour la nationalité française. Une partie des étrangers quittent la France faute d’avoir pu s’y installer plus durablement et, certains, au moment de la retraite.

Au-delà des fluctuations, la France est de longue date un pays d’immigration, notamment parce que notre pays a fait appel en masse aux étrangers pour faire tourner la machine économique. En période de ralentissement, la plupart des personnes qui ont migré de longue date ne rentrent pas dans leur pays d’origine et s’intègrent au fil du temps. Plus récemment, c’est l’insertion de la France dans un processus de mondialisation qui joue, avec à la fois davantage d’immigration et d’émigration. Il est difficile de savoir quels seront les répercussions de la crise sanitaire et des conflits mondiaux, notamment en Ukraine. La France, au fil de son histoire, n’est jamais restée isolée de ces mouvements internationaux de population, qui vont se poursuivre, qu’ils soient choisis ou subis. L’immigration en France devrait donc continuer à progresser, quelles que soient les options politiques au niveau national. À moins que les tensions internationales se réduisent et que les pays les plus pauvres rattrapent leur retard économique.

Notes:

  1. Voir la définition d’immigré et d’étranger.
  2. Lire aussi notre article sur l’origine des immigrés.