Les 10 % les plus pauvres des villes-centres touchent au plus 4 400 euros par an pour une personne1, contre 9 700 euros dans les couronnes des grandes aires urbaines2. L’Insee livre une étude3 qui éclaircit grandement le débat sur les niveaux de vie en France.

Les communes rurales isolées sont celles où le revenu médian est le moins élevé (16 800 euros par an), avec presque 20 % de moins que dans les couronnes périurbaines des grandes aires urbaines (20 500 euros), territoires les plus aisés. Avec 18 200 euros, les villes-centres occupent une position intermédiaire. Le milieu rural isolé est en partie composé de ménages d’agriculteurs âgés avec de faibles retraites du fait de l’inactivité (officielle) des femmes. Les couronnes périphériques sont le plus souvent occupées par des ménages des couches moyennes plutôt aisées qui disposent d’un niveau de vie leur permettant d’accéder à une propriété  individuelle et de quitter les banlieues.

Les territoires ruraux isolés représentent moins de 5 % de la population, moins d’un quart de la population des seules villes-centres (23,2 % du total), un dixième de l’ensemble villes-centres et leur proche banlieue. Surtout, à l’intérieur des villes-centres la plus grande richesse de quelques quartiers favorisés côtoie l’extrême pauvreté.

Les 10 % les plus pauvres du milieu rural isolé touchent 1,6 fois plus que les plus démunis des centres-villes, les habitants des couronnes périurbaines 2,2 fois plus. Certes, cet écart est exagéré car l’Insee ne prend pas en compte les prestations sociales. Mais à l’évidence, les gros bataillons des plus pauvres vivent soit dans les villes-centres, soit dans les banlieues proches qui, elles-aussi, mélangent les territoires cossus (notamment dans l’Ouest-parisien) et les communes les plus pauvres (Nord-Est de Paris). Selon une autre étude de l’Insee, 80 % des quartiers les plus défavorisés (classés prioritaires par la politique de la ville) appartiennent à des agglomérations de plus de 100 000 habitants.

Comme le note l’Insee, la crise accroît encore ces disparités. Entre 2007 et 2011, le revenu maximum des 10 % les plus pauvres a baissé de 1,3 % pour l’ensemble de la France, mais il a perdu 9,2 % dans les villes-centres et gagné 3,9 % dans les communes rurales isolées, ainsi que dans les couronnes périurbaines des grands pôles. Cette évolution est pour l’essentiel liée à la poussée du chômage, qui percute d’abord des populations peu qualifiées qui vivent en ville.

Ces nouvelles données indiquent clairement où se situent les difficultés sociales de la France contemporaine : proche du périphérique et non à la périphérie lointaine. Pour aller plus loin, il faudrait pouvoir observer le détail de chaque territoire. L’Insee ne devrait livrer qu’à la fin de l’an prochain des taux de pauvreté par commune et par quartier. Ceci dit, les estimations réalisées par le Compas4 confirment les conclusions actuelles de l’Insee : les taux de pauvreté sont beaucoup plus élevés dans les grandes villes et même Paris n’y échappe pas. Ce qui n’empêche pas de porter attention à la pauvreté rurale, même très minoritaire, ainsi qu’à celle qui persiste dans les plus petites communes ou dans une partie défavorisée des territoires périurbains, notamment là où l’industrie est la plus implantée.

Notes:

  1. Montant pour l’équivalent d’un adulte seul. Données avant impôts et prestations sociales
  2. Voir nos définitions des différents espaces.
  3. « Des revenus élevés et en plus forte hausse dans les couronnes des grandes aires urbaines », Jean-Michel le Floch, In « France, portrait social », éd. 2014, Insee, novembre 2014.
  4. « Les taux de pauvreté dans les 100 plus grandes communes de France », Compas études n°11, janvier 2014.