
Les inégalités sociales sont visibles dès les petites classes, mais peu ou prou, tous les élèves vont jusqu’en troisième. C’est ensuite que les milieux sociaux ne fréquentent plus les mêmes filières. Pour le mesurer, on peut observer l’évolution de la part des enfants de cadres et d’ouvriers au fil des scolarités. Progressivement, les premiers représentent une part croissante des élèves, alors que celle des seconds s’amenuise1.
Au collège, les enfants de cadres et d’ouvriers représentent la même part de l’ensemble des élèves (environ 23 %), selon le ministère de l’Éducation nationale (données 2023-2024). Au niveau du lycée, les enfants d’ouvriers sont surreprésentés dans les filières professionnelles et techniques. Ils regroupent 31,3 % des élèves de seconde générale et technologique contre 17,9 % pour les enfants de cadres. En CAP, ils sont tout autant nombreux, alors que les enfants de cadres regroupent six fois moins des élèves. En revanche, en première et en terminale générales, on compte plus de deux fois plus d’enfants de cadres (37,1 %) que d’ouvriers (14,8 %).

La baisse de la part d’enfants d’ouvriers se poursuit ensuite. Ces derniers forment 8,7 % des étudiants à l’université, 6,4 % dans les classes préparatoires aux grandes écoles et 2 % des élèves des écoles normales supérieures (parmi les plus sélectives des grandes écoles). Inversement, la part des enfants de cadres augmente : ils forment 34,5 % des étudiants à l’université, 53,7 % en classes préparatoires et 64,9 % dans les écoles normales supérieures (dites « Normale sup’ »). Alors qu’ils sont tout autant nombreux que les enfants de cadres au collège, les enfants d’ouvriers sont 30 fois moins représentés au sein de l’élite scolaire française.
Il existe en France des filières de promotion sociale. En BTS par exemple, les enfants d’ouvriers sont presque aussi bien représentés (21,6 %) qu’au collège, alors que leurs parents sont souvent loin d’être allés jusqu’à ce niveau. Sans service public d’éducation, les écarts auraient une tout autre ampleur. En revanche, comme le montrent ces données, notre système est loin de faire ce qu’il devrait pour assurer l’égalité des chances scolaires. Essentiellement parce que la compétition y est très tendue, que l’école française laisse peu de place à l’expérience et qu’elle cherche à sélectionner quelques bons élèves plutôt que d’éviter d’en perdre un grand nombre en route.
Photo / © Robin Ooode / Unsplash
Notes:
- Ces données représentent la situation une année donnée, il ne s’agit pas du suivi dans le temps d’une génération d’élèves. ↩