La France a investi massivement dans l’école dans les années 1960 et 1970 pour rattraper le retard qu’elle avait sur le reste de l’Europe. À l’école élémentaire, notre pays est passé de 28 à 23 élèves par classe en moyenne entre 1960 et 1980. En maternelle (voir graphique), l’évolution a été encore plus spectaculaire : de 43 élèves par classe en 1960, on est descendu à 40 en 1970, à 30 en 1980 et à 25 à la fin des années 1990. La taille des classes a peu évolué jusqu’au milieu des années 2010. Elle a repris sa baisse à partir de 2015, du fait du fléchissement des naissances et de la politique de réduction des effectifs pour les classes de CP et CE1, qui ne concerne que les écoles relevant de l’éducation prioritaire (20 % de l’ensemble) menée à partir de 2017. En maternelle, le nombre d’élèves par classe est passé de 24,3 à 22,4 entre 2016 et 2021, au primaire, de 23,5 à 21,3.

La baisse récente, importante pour les premières classes du primaire de l’éducation prioritaire, cache un retard énorme par rapport à nos voisins : la France est l’un des pays riches où l’on compte le plus d’élèves par enseignant1, qu’il s’agisse de l’école maternelle comme de l’élémentaire. Avec près de 14 enfants par enseignant et personnel spécialisé2 en moyenne, la France est très loin derrière les autres pays comparables pour les élèves de trois à cinq ans, selon les données de l’OCDE pour 2020. À l’école élémentaire, la situation est similaire. Avec 18 élèves par enseignant, la France est très au-dessus de la plupart des pays, souvent entre 12 et 15 élèves. Nous sommes seulement dépassés par le Royaume-Uni. Et encore, la taille moyenne des classes peut masquer des disparités importantes selon les écoles : un tiers des classes de maternelle françaises ont plus de 25 élèves, certaines beaucoup plus.

Notre retard demeure considérable. En profitant de la baisse des naissances enregistrée depuis 2015, la France aurait pu investir dans ce domaine, pas uniquement dans les écoles de l’éducation prioritaire. Le nombre d’enfants par enseignant joue un rôle sur la qualité des apprentissages et peut constituer l’une des explications de notre mauvaise position dans les évaluations internationales du niveau scolaire ou des lacunes dans certaines disciplines, comme l’orthographe. Ce nombre joue aussi, on l’oublie assez souvent, sur les conditions de vie en classe (le bruit, la chaleur, la promiscuité et la sécurité) au quotidien de ces très jeunes enfants qui passent une grande partie de leur temps à l’école. Ils vivent plus de 20 heures par semaine, parfois à 30, voire à 35, dans des salles de classe mesurant entre 52 m2 et 63 m2 selon la norme définie par l’Éducation nationale. Ce qui serait jugé inacceptable pour des adultes au travail, l’est finalement pour les plus petits.

Notes:

  1. On rapporte ici le nombre d’élèves à celui des enseignants, qui est différent de la taille moyenne des classes. On comptabilise notamment les enseignants qui ne sont pas en permanence devant une seule classe.
  2. Ces données comprennent en France les agents territoriaux spécialisés, qui épaulent les enseignants.