Dans les années 1960, les hommes gagnaient en moyenne presque 60 % de plus1 que les femmes pour des temps complets (sans tenir compte de l’effet du temps partiel). Petit à petit, l’écart s’est réduit pour atteindre 17,4 % en 2020 selon l’Insee. Le mouvement prend de l’ampleur à partir des années 1970, quand les générations de femmes scolarisées dans l’après-guerre arrivent sur le marché du travail. Ce mouvement va se poursuivre par la suite un peu plus lentement à partir du milieu des années 1980.

Au rythme de rattrapage des cinq dernières années, il faudrait encore 25 années pour que la rémunération des femmes à temps complet atteigne celle des hommes. Les nouvelles générations de femmes sont certes de plus en plus diplômées et accèdent à davantage de postes à responsabilité (elles représentent 42 % des cadres supérieurs), mais la progression reste lente. Pendant le même temps, l’emploi féminin peu qualifié se développe avec des rémunérations rarement supérieures au smic. La situation des femmes sur le marché du travail demeure décalée par rapport à leur niveau de diplôme, surtout pour les plus jeunes. Cela fait bientôt 40 ans que l’on compte plus de femmes de 25 à 49 ans diplômées de l’enseignement supérieur que d’hommes. Parmi les personnes en emploi, la part des femmes disposant d’un diplôme supérieur à bac + 2 est plus élevée que celle des hommes depuis le début des années 2000 (lire notre article).

Ces données, pour des temps complets uniquement, sont incomplètes. Elles masquent l’effet du temps partiel aux trois quarts féminin. Toutes formes d’emplois confondues, le revenu salarial médian (le salaire, tous temps de travail confondus) des hommes demeure supérieur de 20 % à celui des femmes. Pour partie, le temps partiel résulte d’un choix, mais environ un quart des femmes dans ce cas souhaiteraient travailler davantage.

La moyenne des salaires cache des écarts qui s’élèvent avec le niveau de rémunération. Les femmes les moins bien rémunérées en temps complet touchent 95 % du salaire des hommes. L’écart est faible parce que les salaires sont bas et que le smic constitue un plancher. En revanche, au seuil des 10 % les mieux rémunérés, les femmes n’atteignent que 82 % des salaires masculins, 79 % pour le seuil des 5 % et 71 % pour le 1 %.

Les femmes rattrapent difficilement leur retard du fait de trois facteurs : 1- leur faible présence aux postes les mieux payés, 2- l’ampleur de l’écart de rémunération entre le haut et le bas de la hiérarchie globale des salaires en France, 3- la dévalorisation des métiers au sein desquels la part des femmes est plus importante.

Ne pas confondre inégalité salariale et discrimination

Les données sur les salaires que nous présentons portent sur des temps complets. Il ne faut pas confondre cet écart et le niveau des discriminations. On parle de discrimination pour deux personnes dont le profil ne diffère que du genre. L'écart pour des temps complets annule l'effet du temps partiel, mais il ne tient pas compte d'autres facteurs. Par exemple, les femmes travaillent plus souvent dans des secteurs où les salaires sont plus faibles, et elles sont moins souvent cadres. Si on tient compte de tous ces facteurs, on obtient une évaluation de la discrimination, de l'ordre de 4 %. C'est une estimation, en réalité de ce qui reste quand on a éliminé l'effet de tous les facteurs que l'on connaît. La discrimination peut se loger en amont et elle n'est alors pas prise en compte comme telle : par exemple, ce qui fait que les femmes s'orientent vers tel ou tel secteur d'activité.

Notes:

  1. Nous rapportons l’écart de salaire entre les femmes et les hommes au salaire des femmes. L’Insee préfère le rapporter à celui des hommes, ce qui montre alors combien les femmes touchent en moins que les hommes et non l’inverse.