Un peu plus de 70 % des 6-65 ans jouent aux jeux vidéo, selon une enquête réalisée par TNS-Sofres pour le Centre national de la cinématographie1. La moitié des joueurs le font tous les jours, 38 % au moins une fois par semaine mais pas tous les jours, 8 % au moins une fois par mois et 5 % moins souvent. La durée moyenne d’une session est de 2h15.

Les hommes (77 %) jouent davantage que les femmes (66%), mais c’est surtout l’âge qui fait la différence. Quasiment tous les jeunes de 10 à 14 ans jouent, contre moins de la moitié des 50 ans et plus. Le taux qui décline rapidement : une étude plus ancienne réalisée par la ministère de la Culture indiquait que 96 % des plus de 65 ans ne jouaient jamais (données 2008)2. Au fil du temps, on assiste à un effet de génération. Le jeu vidéo s’est développé dans les années 1980 et une partie des jeunes joueurs ont continué à le faire en vieillissant ; la part de joueurs plus âgés augmente.

L’augmentation de puissance des ordinateurs améliore la qualité du graphisme et Internet permet de jouer à plusieurs à distance : le jeu vidéo se développe. Chez les jeunes, il empiète sur la télévision. « Quel que soit le sexe, regarder quotidiennement la télévision constitue une activité à bout de souffle dans les jeunes générations », expliquent les auteurs d’une étude sur les liens et l’impact des écrans sur l’adolescent scolarisé (Pelleas)3. Comme ils l’indiquent, la fréquentation des écrans marque « une rupture culturelle et générationnelle dont les effets sont encore mal connus ».

Selon l’enquête Pelleas, menée auprès de 2000 élèves de région parisienne (de la 4e à la première), 14 % des jeunes joueurs auraient une pratique addictive problématique. Cet ordre de grandeur dépend beaucoup de la définition de l’addiction, mais l’étude a le mérite de donner des informations sur les conséquences du jeu sur la vie des jeunes. Chez ces 14 % de joueurs considérés comme « problématiques », 71 % disent eux-mêmes avoir négligé d’autres activités comme l’école ou le sport. La moitié de ces jeunes indiquent se coucher après minuit la veille d’un jour d’école. Comme l’indique l’OFDT, l’évolution du jeu entraîne « une plus grande accroche du joueur, maintenu en état de stimulation par des règles de plus en plus engageantes ».  Les jeunes dont les relations sont les plus dégradées avec leurs parents sont aussi ceux qui sont le plus souvent concernés4.

Au-delà, la question des valeurs transmises par le  jeu lui-même est rarement évoquée. Pas plus que la télévision, celles-ci ne sont anodines. Comme le rappelle le sociologue Laurent Trémel5. Le plus souvent les jeux valorisent la compétition individuelle la plus poussée, la domination des autres pour réussir. Rien ne dit que les jeunes y adhèrent, mais ils s’en imprègnent. Toute la question est de mesurer le degré de distance qu’ils mettent entre le jeu et la réalité sociale.

Notes:

  1. « Les pratiques de consommation des jeux vidéo des Français », CNC-TNS-Sofres, Les études du CNC, octobre 2014.
  2. « Les pratiques culturelles des Français », ministère de la Culture, données disponibles sur http://www.pratiquesculturelles.culture.gouv.fr/
  3. « Ecrans et jeux vidéo à l’adolescence », Observatoire Français des drogues et toxicomanies, Tendances n°97, décembre 214.
  4. Le lien de causalité peut être inverse : on peut aussi jouer en permanence parce que les liens sont tendus avec ses parents.
  5. « Pour le sociologue Laurent Trémel : faire preuve de circonspection », François Jarraud, Café pédagogique, 15mai 2008.