55 % des Français se positionnent mal sur l’échelle des revenus : 19 % surestiment leur niveau de vie et 36 % le sous-estiment, indique une étude de l’Insee. Si l'on découpe la population en trois tranches égales de revenu perçu (de 0 à 1370 euros mensuels1, de 1370 à 2040 euros, 2040 euros et plus), seul un cinquième du tiers le plus aisé s'auto-positionne correctement, parmi les 33 % les plus riches. 70 % ont le sentiment d’appartenir au tiers intermédiaire et même 8 % au tiers le plus pauvre. A l’autre bout de la distribution, 53 % du tiers de la population la moins favorisée pense appartenir au tiers intermédiaire, et 4 % au tiers supérieur.
De nombreuses raisons expliquent ce décalage. Il n’est pas toujours si facile de connaître l’ensemble de ses revenus2, qui peuvent varier dans le temps : chômage ou emploi intermittent pour les uns, revenus financiers (actions, obligations, immobilier, etc.) pour les autres. Ensuite l’Insee déduit du revenu les impôts directs et ajoute les prestations sociales, alors que les ménages peuvent pratiquer autrement, par exemple en déduisant le coût du logement. En outre, l’institut tient compte des économies d’échelle (une famille n’a pas besoin d’une cuisine par personne par exemple), ce qui est très complexe à estimer pour un non-expert. L’institut note que les Français tiennent davantage compte de leurs conditions de vie matérielles concrètes que de leur revenu effectivement perçu quand ils se positionnent.
Une grande part de subjectivité intervient. Se positionner implique de porter un jugement sur les niveaux de vie dans l’ensemble de la société. En France – c’est l’inverse aux Etats-Unis -, se dire aisé ou riche est mal vu : sauf à considérer la personne la plus riche, il existe toujours plus aisé que soi. Le débat public influence les réponses : le plus souvent, les médias placent la barre des classes moyennes bien au-delà de la moyenne. Enfin, déclarer son appartenance au tiers le plus bas des revenus n’est pas forcément si facile vis-à-vis de l’enquêteur et de soi-même.
Pour en savoir plus :
« Le positionnement sur l’échelle des niveaux de vie », Insee première n°1515, septembre 2014.
Notes: