Le taux de précarité1 atteint 15,3 % des emplois salariés, soit plus de deux fois son niveau des années 1980, selon nos estimations, d’après les données de l’Insee. La progression a été très forte du milieu des années 1980 à la fin des années 1990, le taux de précarité ayant grimpé de 7 % à 13,8 % en 2000. Jusqu’en 2013, on pensait que le phénomène s’était stabilisé, mais il est à nouveau reparti à la hausse, pour atteindre 16 % en 2017. Depuis, il a diminué d’un point, mais demeure à un niveau particulièrement élevé.

L’emploi salarié n’est pas précarisé dans son ensemble. Les premières victimes de cette situation sont les salariés peu diplômés et les jeunes. Chez les moins de 25 ans, le taux de précarité est passé de 18,7 % en 1982 à 49 % dès 1999. Il a depuis dépassé les 50 % pour cette tranche d’âge, mais a baissé à partir de 2017. Pour partie, cet essor est lié à la montée en puissance de l’apprentissage. Il s’agit bien d’emploi précaire, car la durée du contrat est limitée, mais il est vrai dans le cadre d’une formation. L’emploi précaire augmente chez les hommes comme chez les femmes. Si ces dernières restent plus souvent concernées (15,9 % contre 14,6 %), l’écart se resserre par rapport aux années 1980 et 1990.

Comme à la fin des années 1990, la baisse du chômage à partir de 2015 a un impact positif sur le taux de précarité qui a diminué pour retrouver son niveau du milieu des années 2010. On assiste à un retournement d’importance : certaines entreprises s’inquiètent de ne plus arriver à recruter en contrat à durée indéterminée, car elles font face à une volatilité de la main d’œuvre. Comme on l’a vu, une partie des contrats précaires sont occupées par des jeunes en apprentissage, qui leur permet de s’insérer dans la vie professionnelle.

Le chemin à parcourir pour que le marché du travail retrouve de la stabilité reste long. La précarité de l’emploi a profondément modifié le marché du travail. En réduisant les horizons de vie, en empêchant les jeunes notamment à s’insérer durablement dans la société, elle nourrit les inquiétudes et les tensions sociales. Toute la question est de savoir si la phase actuelle de baisse sera durable ou si, comme à la fin des années 1980 ou au début des années 2000, elle ne constitue que l’une des phases d’un cycle et si, à la faveur d’un fléchissement de la croissance, la précarité reprendra sa tendance à la progression. Si c’est le cas, alors, les conséquences pourraient être dramatiques pour les plus jeunes en particulier.

Photo : Adrian Sulyok / Unsplash

Notes:

  1. Somme des emplois à durée déterminée, en intérim et en apprentissage rapportée à l’emploi salarié.