Le taux de pauvreté moyen, 8 % en 2019 1, masque de profondes disparités selon les milieux sociaux. Les personnes qui vivent dans un ménage dont la personne de référence est inactive (hors retraités2) sont les plus touchées, et de loin, avec un taux de 38,5 %. Il s’agit en partie de femmes âgées qui n’ont jamais travaillé et dont le mari est décédé, ou de personnes en grande difficulté sociale et qui ont abandonné leurs recherches d’emploi. Dans les ménages dont la personne de référence est retraitée, le taux est de 4,1 %. Certes, c’est deux fois moins que la moyenne nationale, mais cela signifie que vivre d’une retraite après des années de travail ne suffit pas toujours à sortir de la pauvreté.

Dans les ménages où la personne de référence est active, le taux de pauvreté est particulièrement élevé (15,5 %) chez les non-salariés : agriculteurs, artisans et commerçants, chefs d’entreprise. Une part des indépendants – par exemple ceux qui travaillent à la tâche pour des plateformes numériques – ne retire que de maigres revenus de son travail3. Sur les cinq millions de personnes pauvres (au seuil de 50 %), un million d’entre elles vivent dans un ménage où la personne de référence est ouvrière et 700 000 où elle est employée, avec des taux de pauvreté respectifs de 10,1 % et 8,8 %. Il peut s’agir de chômeurs faiblement indemnisés, de personnes qui occupent des emplois à temps très partiel ou très précaires. À l’intérieur de ces catégories, les taux de pauvreté varient fortement. Pour les ménages dont la personne de référence est employée à domicile (femme de ménage, assistante maternelle par exemple), le taux de pauvreté atteint 22 %. Il est de 20 % pour les employés non qualifiés de type artisanal (ouvriers du bâtiment, personnels de ménage dans les bureaux ou l’industrie, etc.).

Une personne pauvre sur dix – toujours au seuil de 50 % – vit dans un ménage de professions intermédiaires et de cadres supérieurs. Les taux de pauvreté y sont très faibles, respectivement 3 % et 2 %, ce qui représente tout de même 500 000 personnes. Comment peut-on être cadre mais avoir un niveau de vie inférieur à 900 euros pour une personne seule, le seuil de pauvreté ? Il peut s’agir, par exemple, de jeunes diplômés employés en temps très partiel. Cela peut aussi être le cas de familles : ces données prennent en compte l’ensemble des revenus du ménage et pour un couple avec deux enfants en bas âge, le seuil de pauvreté à 50 % est de 2 000 euros après impôts et prestations sociales. Un ménage composé d’un cadre au chômage d’une personne inactive et de deux jeunes enfants peut être dans cette situation.

La pauvreté ne frappe pas les Français au hasard. Les moins qualifiés sont aux premières loges, souvent dans des situations les plus durables. Pour autant, même si c’est beaucoup moins fréquent, les classes moyennes et supérieures ne sont pas totalement épargnées. Leurs possibilités d’accéder à un niveau de vie meilleur sont sans doute plus grandes, mais pour elles le sentiment de déclassement, de ne pas occuper la place à laquelle leurs qualifications devraient les amener, peut être très important.

Notes:

  1. Seuil de 50 % du niveau de vie médian.
  2. Les étudiants ne sont pas pris en compte dans l’enquête de l’Insee.
  3. Il faut être prudents dans la comparaison avec les salariés, car la comptabilisation des revenus n’est pas identique.