Après avoir augmenté dans les années 2000, la part de personnes qui estiment que leur situation est meilleure que celle de leurs parents au même âge a nettement diminué dans les années 2000. Celle de ceux qui estiment qu’elle est moins bonne est stable et ceux qui pensent qu’elle est à peu près identique progresse.
Pour expliquer une telle évolution, il faut se méfier des simplifications. Toute la population de 18 ans et plus est interrogée : on rassemble différentes générations, qui se comparent avec des générations de parents elles-mêmes très différentes… Les plus anciens des parents ont bénéficié des Trente Glorieuses alors que les parents des enfants les plus jeunes interrogés (18 ans) ont autour de 45-50 ans et sont entrés sur le marché du travail alors que le chômage était déjà à un niveau élevé.
Globalement, plus on s’élève en âge, plus on s’estime mieux loti que ses parents. Pour les classes d’âge récentes, l’effet du décalage entre le niveau de diplôme et l’insertion professionnelle réelle joue : le « sentiment » de déclassement est fondé sur une expérience concrète, liée à l’ampleur du chômage. En 2021, un tiers des jeunes actifs de 18 à 24 ans estiment que leur situation est meilleure que celle de leurs parents au même âge, contre 51 % des plus de 65 ans. Parce que la situation s’est détériorée pour les plus jeunes générations, mais aussi du fait d’un effet propre à l’âge : on vit mieux à 60 ans qu’à 20 ans, on indique plus facilement que sa situation s’est améliorée par rapport à ses parents.
Reste à évaluer les effets liés aux variations subjectives de la sensibilité à la situation sociale. Évaluer la situation de ses parents au même âge est très complexe, notamment pour les plus jeunes. La notion même de « situation », qui figure dans la question, est difficile à déterminer : s’agit-il d’emploi, de niveau de vie, de vie familiale ou autre ? L’amplification du débat public sur la situation sociale peut jouer, comme c’est le cas pour l’insécurité, les violences, les conditions de travail, etc. Indiquer que « c’était mieux avant » peut aussi être compris comme une position critique par rapport à certaines des évolutions sociales que l’on juge négatives, même si sa propre situation est meilleure en réalité que celle de ses parents.
On notera une inversion notable en 2021. Il peut s’agir d’un effet lié à la sortie de la crise sanitaire où, finalement, les personnes estiment qu’elles ont échappé à une crise majeure. Ou du premier signe d’un redressement plus durable, lié à l’amélioration du marché du travail et à la baisse du chômage. Les variations annuelles ont peu de signification, il faudra observer ce qu’il en sera les prochaines années. Rien n’empêche d’être optimiste.
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