Un peu moins de six millions d’écoliers étudient dans l’enseignement public primaire (élémentaire ou pré-élémentaire), selon les données 2017 du ministère de l’Education. Parmi eux, 20 % (soit 1,2 million) sont scolarisés dans un établissement de l’éducation dite « prioritaire » et 4,6 millions dans une école qui n’appartient à aucun réseau prioritaire. L’éducation prioritaire se fixe pour objectif de compenser les difficultés économiques et sociales des habitants de certains quartiers en attribuant davantage de moyens aux établissements qui s’y trouvent. Elle se divise en deux : les « Réseaux d’éducation prioritaire » (REP, 12 % du total des élèves) et les « Réseaux d’éducation prioritaire Plus » (REP+, 8 % de l’ensemble) qui sont le plus en difficulté et disposent de moyens encore renforcés.La proportion d’élèves défavorisés (dont les parents sont ouvriers ou inactifs) atteint 66 % au sein des écoles de l’éducation prioritaire. En REP+, cette proportion atteint même 75 %. Hors éducation prioritaire, elle s’élève à 45 %. Mais l’éducation prioritaire dans son ensemble ne regroupe qu’un cinquième du total des élèves du pays, et ces élèves ne sont pas tous défavorisés. Les 66 % d’élèves issus de familles modestes qui vont à l’école dans ces quartiers représentent 800 000 jeunes, alors que 45 % dans l’ensemble des autres quartiers (donc 80 % des élèves) regroupent plus de deux millions d’enfants. Au bout du compte, seul un quart des élèves défavorisés (800 000 rapportés à 2,9 millions)  sont scolarisés dans une école dépendante d’un réseau éducation prioritaire1.

Cela signifie qu’il existe encore de la mixité sociale en France : un grand nombre d’enfants de milieux modestes habitent dans des quartiers favorisés. Cela veut aussi dire que les dispositifs de l’éducation prioritaire, quoi que l’on pense de leurs effets2, ne s’adressent pas aux trois quarts des élèves issus de milieux défavorisés. Limiter les politiques éducatives pour les plus démunis à ce type de dispositif (comme l’actuelle réduction de la taille des classes par exemple) laisse de côté l’essentiel des élèves qui en auraient besoin. C’est encore plus plus vrai pour les mesures qui ne concernent que les 8 % d’élèves de REP+.  Si l’on souhaite que les politiques publiques soutiennent les jeunes qui n’ont pas les mêmes atouts que les autres, il faut donc agir bien au-delà de ces territoires. Cette remarque est valable pour l’action territoriale en faveur des plus démunis en général. Elle peut être utile localement, mais elle ne s’applique qu’à une part très réduite des milieux populaires.

Notes:

  1. La situation est semblable dans les collèges.
  2. Pour résumer : faute de moyens et de réforme de la pédagogie scolaire, ils restent faibles.