Le débat sur la place des religions est souvent très vif dans notre pays. Pourtant, ces dernières décennies sont surtout marquées part la progression de l’athéisme. Entre 1981 et 2018, la part des Français qui disent « croire en Dieu » a baissé de 62 % à 50 %, selon l’enquête européenne sur les valeurs (Arval)1. Au rythme actuel, ils seront minoritaires dans une dizaine d’années. Il s’agit d’une tendance historique liée à l’émancipation des individus vis-à-vis de nombreuses institutions – bien au-delà de l’Eglise catholique – et une conséquence de l’aspiration à une plus grande liberté individuelle dans les choix de vie. C’est particulièrement clair dans le domaine du couple, des pratiques sexuelles et de la procréation. L’élévation du niveau de diplôme et l’accès à l’autonomie des femmes sont deux des principaux moteurs de ces transformations.

Depuis les années 1980, on a assisté à une très forte diminution de ceux qui se déclarent catholiques, de 70 % en 1981 à 32 % en 2018 alors qu’à l’opposé la part de ceux qui indiquent n’appartenir à aucune religion 2 a augmenté de 26 % à 58 %. La part de protestants et d’autres types de religion a légèrement augmenté, de 3 % à 4 %. Celle des musulmans a plus nettement progressé, surtout entre 1999 et 2018, de 1,3 % à 6 % selon l’enquête Arval.

La croyance se distingue de la pratique religieuse. Selon les données 2021 de l’Ifop, 6,6 % des Français se disent catholiques pratiquants. L’institut ne distingue pas les pratiquants pour les autres religions, mais une enquête du même institut menée en 2019 indiquait que seuls 38 % des musulmans interrogés disent aller généralement à la mosquée le vendredi, ce qui représente environ 1,6 % de la population française si l’on se base sur les données 2021 de l’Ifop, qui enregistre 4,2 % de musulmans. Au total, les religieux pratiquants ne représentent depuis longtemps dans la société française qu’une très petite minorité. Au total, selon l’enquête Arval, 12 % de la population assiste à un service religieux au moins une fois par mois (données 2018) et 8 % chaque semaine. En 1981, les proportions étaient respectivement de 18 % et 12 %.

La mesure de l’évolution du poids des religions dans la société française reste très délicate, tant elle demeure subjective. L’état des croyances ne se réduit pas à des pratiques rituelles, comme le fait d’assister ou non à des cérémonies. Si les chrétiens ont incontestablement assoupli en pratique les règles imposées par la tradition, en revanche, le degré de « croyance » ne peut s’évaluer. Il en est de même chez les musulmans où les déclarations d’appartenance, notamment chez les jeunes, peuvent relever d’une forme d’identification culturelle à une communauté plus que de croyances profondes. Quelle que soit la religion déclarée, le fait de se dire d’« origine » ou « proche » s’accommode parfois d’un lien assez lointain3. Que signifie cette distance ? Le lien avec le religieux s’est transformé, mais pour ceux qui déclarent croire en Dieu le choix est aussi moins imposé et plus réfléchi. Exactement comme aujourd’hui le choix du partenaire dans le couple4.

Notes:

  1. La France des valeurs, quarante ans d’évolution, Pierre Bréchon et al., Presses universitaires de Grenoble, 2019.
  2. On peut croire en Dieu sans se rattacher à une religion spécifique.
  3. Par exemple, selon l’Ifop par exemple un tiers des personnes qui se disent musulmanes ne respecte pas le jeûne du ramadan.
  4. Même si dans les deux cas facteurs sociaux et individuels se combinent toujours