Le taux de pauvreté au seuil à 60 % du niveau de vie médian (environ 1 000 euros pour une personne seule) atteint 43,2 % dans les 1 400 quartiers les plus pauvres de France, contre 14,6 % pour l’ensemble de la France, selon les données 2018 de l’Insee. Ces quartiers appelés « quartiers prioritaires de la politique de la ville » regroupent environ cinq millions de personnes un peu moins de 8 % de la population française. On les appelle « prioritaires » car ils bénéficient de moyens supplémentaires alloués par l’Etat de la politique de la ville.

Les revenus de ces quartiers sont très inférieurs au reste du pays. Les 10 % les plus pauvres y vivent avec 684 euros mensuels au maximum, contre 958 euros pour l’ensemble de la France. Le niveau de vie médian (la moitié touche moins l’autre davantage) atteint 1 130 euros contre 1 810 en moyenne. Quant au seuil d’entrée dans les 10 % les plus riches, à 1 900 euros mensuels il dépasse à peine le niveau de médian de la France entière.

Ces quartiers sont pauvres par définition puisque c’est le niveau de revenu qui sert à les délimiter. Cette situation résulte de l’ampleur du chômage, des faibles diplômes, mais aussi du fait que l’on trouve dans ces quartiers plus de familles nombreuses. Ces quartiers comprennent 20 % de population étrangère (trois fois plus que pour l’ensemble du pays), dont une partie subit les discriminations à l’emploi et le fait de ne pas pouvoir accéder aux emplois publics réservés aux nationalités de l’Union européenne. Leur développement est particulièrement complexe : les populations pauvres s’y installent et les plus aisés les quittent, ce qui maintient structurellement un haut niveau de pauvreté.

Ces territoires réunissent des situations très différentes. Une partie connaît des difficultés énormes. Dans le petit quartier « résidence sociale Nicéa » de Nice, le taux de pauvreté dépasse les 80 %. Dans les 50 quartiers les plus défavorisés, le taux de pauvreté est supérieur à 60 %, soit trois fois plus que les quartiers prioritaires dans lequel le taux de pauvreté est le plus bas. Toute une partie de ces quartiers sont très éloignés de la caricature médiatique qu’on en fait : il s’agit de territoires modestes, de la France populaire de l’habitat social.

On qualifie aussi de quartiers prioritaires des territoires qui n’ont rien à voir en taille. Quoi de commun entre le quartier cité de Nice ou d’autres dont la population dépasse à peine un millier de personnes et l’ensemble « Franc Moisin-Cosmonautes » qui va d’Aubervilliers à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) et qui rassemble plus de 110 000 habitants ? Les principaux quartiers prioritaires représentent l’équivalent de villes intégrées dans des métropoles de grande taille, parfois très riches, où ’échelle des difficultés sociales n’est pas la même, même si en proportion on peut y compter autant de personnes pauvres rapporté à la population totale.

Enfin, il ne faut pas oublier que ces quartiers, même dans les situations les plus graves, ne regroupent que 8 % de l’ensemble de la population française. Même avec un taux de pauvreté très élevé, seuls 2,1 millions de personnes pauvres vivent dans ces quartiers, soit moins d’un quart de l’ensemble de la population pauvre. Ces territoires sont marqués par la pauvreté et des niveaux de vie bien plus faibles que dans le reste du territoire, leurs difficultés sont réelles et ils nécessitent une attention particulière. Il n’en demeure pas moins que l’assimilation quartiers prioritaires = territoires où vivent les plus pauvres est très trompeuse.