Les deux tiers des personnes pauvres vivent au coeur des grands pôles urbains. En livrant la répartition des personnes pauvres par type de territoire1, l’Insee apporte une réponse détaillée à la question « où vivent les pauvres ? ». L’institut permet de quantifier ce qui relevait de l’évidence pour de nombreux observateurs : les plus démunis vivent dans les communes les plus peuplées, là aussi où habitent les plus riches, et où les inégalités de revenus sont les plus fortes. Le tiers qui reste vit pour 17 % dans les communes périurbaines, pour 13,4 % dans les petites et moyennes agglomérations ou leurs communes proches2 et 5,4 % dans les communes rurales isolées. La France périurbaine et rural ne regroupe qu’une minorité de personnes pauvres.

Nous avions montré à partir des données de l’Insee que 57 % des pauvres vivaient dans des communes de plus de 50 000 habitants et 21 % dans des communes rurales. Une partie de ces communes sont des territoires périurbains, parfois très proches des grandes villes. Par ailleurs, une étude publiée fin 2014 indiquait que les revenus des 10 % les plus pauvres étaient plus de deux fois moins élevés dans les villes-centres que dans leur couronne périurbaine (4 400 contre 9 900 euros par an pour une personne).

Ces nouvelles données offrent un nouveau découpage géographique du territoire, qui permet de lire encore plus finement la situation sociale du pays. Les communes ne sont plus seulement réparties en fonction de leur taille ou de leur statut rural/urbain, comme c’était le cas auparavant, mais entre des aires urbaines composées de pôles et de couronnes périurbaines (en fonction de leur taille), ainsi que des communes rurales isolées (lire nos définitions). Cette distinction est importante : le rural périurbain n’a pas grand chose à voir avec le rural isolé.

L’importance de la pauvreté urbaine permet de situer les difficultés là où elles sont le plus. La pauvreté rurale des plus âgés existe, mais en quantité reste minime comparée à celle des jeunes qui vivent au bord des périphériques des grandes villes. La question est désormais d’aller plus loin. D’une part, en complétant ces éléments par d’autres, comme le chômage, la précarité ou les catégories sociales, ce qui permet de multiplier les éclairages. Ainsi, la définition des contours de la politique de la ville par le seul critère monétaire pose de nombreux problèmes3. Le seul revenu résume mal les difficultés sociales, il rassemble par exemple des personnes âgées sans loyer à payer et des jeunes dont les besoins ne sont pas  équivalents. D’autre part, en allant mesurer les revenus de façon encore plus fine. L’essentiel se joue au sein des grandes villes du fait de la densité de population. D’ici la fin de l’année, l’Insee devrait publier des données sur les niveaux de vie (après impôts et prestations sociales) quartier par quartier : l’analyse des territoires devrait alors faire un bond en avant.

Notes:

  1. Selon le découpage dit « zones en aires urbaines », plus précisément. Une aire comprend un pôle (ville centre et banlieue) et sa couronne périurbaine. Les aires sont définies en fonction du nombre d’emplois qu’elles regroupent, plus de 10 000 emplois pour une grande aire.
  2. Ces dernières communes n’ont pas le statut de « périurbaines », mais leur habitat peut en être proche. Certaines sont rurales, d’autres urbaines.
  3. Voir « Politique de la ville, la pauvreté en concentré« , Observatoire des inégalités, 17 juin 2014.