surendettement dossiers annuelsEnfin du mieux en matière de surendettement. Le nombre annuel de dossiers déposés et déclarés recevables par la Banque de France a diminué de 13 % entre 2014 et 2017, soit 30 000 dossiers en moins par an1. C’est la première fois depuis que les données existent que l’on enregistre un mouvement d’aussi grande ampleur. Ce chiffre s’était déjà stabilisé au début des années 2000, mais la crise de la fin de la décennie avait entraîné une progression de 30 % entre 2007 et 2011.

Plusieurs facteurs expliquent ce changement. La forte diminution des taux d’intérêt a réduit l’endettement : le taux des nouveaux crédits renouvelables par exemple (crédits à très court terme) a baissé de 13 % par an à un peu plus de 8 %. L’encadrement renforcé des pratiques des organismes de crédit (lois Lagarde de 2010 et Hamon de 2015) ont joué. La banque souligne aussi que de très nombreux crédits ont été renégociés. Au total, entre 2012 et 2017, la masse des crédits à la consommation a baissé d’un tiers, celle des seuls crédits renouvelables de 42 %.

Pour l’essentiel, des dettes immobilières ou liées à la consommation

La dette des ménages surendettés s'élève à 7,2 milliards d’euros en 2017, chiffre à rapporter aux 1 350 milliards d’euros de revenu total des ménages. Aux trois quarts, cette masse porte sur des emprunts immobiliers (36 %) ou des crédits à la consommation (37 %), le reste relevant de loyers impayés (5,5 %), de caution d’autres emprunteurs (4 %), d’impôts en retard (3 %), etc. En moyenne, les dossiers portent sur 43 000 euros. La plupart comprennent des crédits à la consommation, mais les cas les plus difficiles résultent d’emprunts immobiliers. Ces derniers ne représentent que 14 % du total des dossiers, mais leur niveau (plus de 100 000 euros) est bien plus élevé que la moyenne. A l’inverse, les crédits à la consommation représentent 80 % des dossiers, mais avec une dette moyenne de 20 500 euros (12 000 euros pour les seuls crédits renouvelables).

 

Qui sont les surendettés ?

surendettement ménagesLes 34-54 ans représentent la moitié des surendettés mais un tiers de la population. Les célibataires sont sous-représentés alors que les personnes divorcées ou séparées sont nettement surreprésentées : elles regroupent 28 % des ménages surendettés contre 8 % de l’ensemble des ménages. Le facteur essentiel est le niveau de vie : les ménages qui n’arrivent pas à rembourser sont d’abord issus de milieux modestes. 28 % sont sans activité professionnelle, une part deux fois supérieure à la représentation de cette catégorie dans la population totale. Employés et ouvriers constituent environ 57 % des surendettés, soit deux fois plus que leur part dans la population des ménages. Enfin, la moitié des ménages surendettés dispose de ressources inférieures ou égales à 1 445 euros, alors que 20 % de la population est dans ce cas. Un ménage surendetté sur deux n’a aucune capacité de remboursement.

Le surendettement est à la conjonction de deux phénomènes. D’abord, l’essor de la consommation et des crédits de court terme pour l’achat d’un ou plusieurs biens (cuisine, équipement ménager, etc.) qui vont avec. La publicité, même mieux encadrée aujourd’hui, pousse à l’achat d’impulsion : l’attrait des biens présentés est difficilement résistible. Ensuite, le plus souvent une rupture de parcours rend le remboursement complexe : séparation ou période de chômage, qui entraîne une baisse plus ou moins grande et durable des ressources du ménage. Pour les plus défavorisés, l’opération peut vite devenir impossible. A la différence d’un bien immobilier, le bien de consommation a perdu sa valeur et ne peut servir de base à un remboursement.

La baisse actuelle va dans le bon sens et montre que, même si elles ont tardé à être appliquées, les mesures de contrôle de l’accès au crédit commencent à porter leurs fruits. Les procédures de désendettement des ménages sont mieux organisées : la procédure instaurée en 2003, dite de « rétablissement personnel », qui permet l’effacement d’une partie de la dette, a concerné 74 000 dossiers en 2017. L’amélioration de la situation économique depuis 2016 joue aussi favorablement.

Beaucoup reste à faire. Le nombre de dossiers de surendettement reçus en 2017 se situe au niveau élevé atteint en 2008 : il faudrait que la baisse se poursuive encore de nombreuses années pour que l’on revienne au niveau des années 1990. Le nombre global de dossiers de surendettement en cours ne diminue que depuis la mi-2016 où il avait atteint 850 000 foyers. Il en reste tout de même 790 000 fin 2017, un niveau très élevé. Enfin, l’encadrement des crédits à court terme est loin d’être complet. Ainsi, le taux de l’usure (le taux d’intérêt légal maximum) atteint encore 21 %2 pour les prêts de moins de 3 000 euros et 13 % entre 3 et 6 000 euros.

Notes:

  1. Voir : Le surendettement des ménages. Enquête typologique 2017, Banque de France, janvier 2018.
  2. Taux au 1er avril 2018.