
Cette évolution importante est passée totalement inaperçue des radars médiatiques. Il faut dire que pour l’apercevoir, il faut explorer les méandres des données de l’Insee. Depuis une quinzaine d’années environ, la part de couples vivant en « union libre »1 stagne autour de 20 % de l’ensemble des unions, voire diminue légèrement dans les années récentes. Ce mode d’organisation de la vie à deux avait connu une très forte progression entre les années 1970 et le début des années 2000, le mariage est alors de moins en moins vécu comme un préalable nécessaire pour vivre ensemble et en particulier avoir des enfants.
La tendance n’est pas simple à observer puisqu’entre 1999 et 2011, les données de l’Insee portent sur l’ensemble des « cohabitants », mélangeant unions libres et Pacs. Et ce n’est en effet qu’à partir de 2015 – plus de quinze ans après la création du Pacs – que les différents statuts de la vie conjugale sont distingués dans le recensement2.

La stagnation de l’union libre s’explique d’abord par l’instauration du Pacs. Cette forme plus souple de vie à deux a attiré une partie des personnes vivant en union libre, mais qui n’étaient pas prêtes à s’engager dans une forme d’union plus contraignante. Pas uniquement, car le Pacs a aussi été une alternative à une partie des couples qui, sinon, se seraient mariés.
La majorité des couples ont besoin, à partir d’un certain temps de vie commune, d’établir une sorte de contrat. Pour des raisons morales, pour officialiser leur couple vis-à-vis de la famille, des amis par exemple, et parfois religieuses. Aussi pour des raisons pratiques. En effet, les couples vivant en union libre ne bénéficient pas de l’imposition commune, ce qui désavantage très fortement ceux d’entre eux dont les revenus sont inégaux3 : la collectivité « reconnaît » fiscalement le couple en tant que tel et la solidarité qui existe en son sein. Mais les concubins sont considérés comme étrangers en matière de succession ou de pension de réversion4. Sauf à une individualisation complète des règles fiscales du Pacs et du mariage (ce qui est peu probable) ou à une reconnaissance de par l’administration du couple sur simple déclaration (c’est déjà le cas pour ce qui concerne les enfants), il est probable que l’union libre ne progresse guère à l’avenir.
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Notes:
- Vivant en couple sans être ni pacsé, ni marié, autrefois on employait le terme de « concubinage ». ↩
- Voir par exemple : « Le recensement de la population évolue : de l’état matrimonial légal à la situation conjugale de fait », Insee Analyses n° 35, octobre 2017 ↩
- L’imposition commune établit une sorte de moyenne des deux revenus et aboutit à un taux d’imposition inférieur. ↩
- Les pacsés sont aussi dans ce dernier cas. ↩