70 % des 25-65 ans vivent en couple, avec ou sans enfants. Le fait de partager son quotidien avec un partenaire et d’élever des enfants ensemble reste un modèle de vie très largement dominant. A 50 ans, la part des personnes vivant en couple a perdu 11 points entre 1990 et 2014, chez les hommes comme chez les femmes, passant respectivement de 81 % à 70 % et de 79 % à 68 %. Ce phénomène résulte de recompositions familiales, il n’implique en rien que le couple en tant que tel batte de l’aile au profit de la vie en solo choisie. A 55 ans, seuls 8 % des générations 1948 à 1957 n’ont jamais vécu en couple. La part des personnes n’ayant jamais vécu en couple à 35 ans est quasiment la même pour cette dernière génération et la génération 1968-1977 née vingt années plus tard (le taux passe de 12 à 13 %). Et même, à partir de 70-80 ans, l’allongement de la vie et la réduction de l’écart d’espérance de vie entre femmes et hommes ont pour effet une hausse très nette de la part de personnes vivant à deux.
Le couple est moins souvent déclaré officiellement en tant que tel. L’« union libre », terme désormais désuet, a fortement progressé : 5 % des couples étaient concernés au début des années 1980, contre 20 % aujourd’hui. Officialiser l’union que l’on forme est de moins en moins une norme sociale contraignante. Parmi ceux qui choisissent de le faire, de moins en moins optent pour le mariage. On comptait neuf mariages pour 1 000 habitants par an dans les années 1950, on en enregistre moins de quatre actuellement. Près de 60 % des enfants naissent hors du mariage. Le Pacs a contrebalancé ce mouvement : son nombre a augmenté très fortement jusqu’à 200 000 contrats enregistrés en 2010, mais il n’a plus dépassé ce niveau depuis. Si l’on fait la somme des mariages et des Pacs, plus de 400 000 unions sont officialisées chaque année contre 300 000 au début des années 2000. Sur ce total, environ 14 000, soit 3,5 %, sont le fait de personnes de même sexe (environ 7 000 mariages et 7 000 Pacs).
Ces évolutions traduisent une aspiration à former des unions plus souples, qui n’ont plus nécessairement besoin d’être reconnues officiellement. Le mariage a perdu une partie de sa force symbolique, religieuse ou non. Elles résultent de l’autonomie croissante des personnes : de plus en plus veulent organiser librement leur vie privée. Une flexibilité qui a de nombreuses conséquences.
La progression des ruptures change la vie d’une partie des familles. 720 000 familles, soit 9,3 % de l’ensemble, sont recomposées, selon les données 2011 de l’Insee. Ces familles rassemblent 1,5 million d’enfants, soit un peu plus d’un enfant sur dix, alors que 18 % vivent dans une famille monoparentale et 71 % dans une famille que l’Insee appelle « traditionnelle » (composée des deux parents et sans demi-frères et sœurs). En particulier, le nombre de familles monoparentales – le plus souvent une femme seule et ses enfants – a fortement augmenté, de 9,4 % à 23 % de l’ensemble des familles entre 1975 et 2014.
La rupture a été facilitée pour le plus grand bien des partenaires, en particulier des femmes qui auparavant pouvaient se trouver enfermées dans le mariage. En revanche, les conséquences, notamment économiques, de ces ruptures restent mal prises en compte. Elles entraînent pour les conjoints (et en particulier les conjointes) de fortes baisses de niveau de vie, que les allocations ne compensent que très partiellement. Le taux de pauvreté des familles monoparentales atteint 20 % au seuil à 50 % du niveau de vie médian, contre 7 % pour l’ensemble des couples avec enfant(s).
Enfin, la question de la garde des enfants demeure un débat sensible. Elle ne pose pas de difficultés dans l’immense majorité des cas, le plus souvent les pères ne réclamant pas de vivre au quotidien avec leurs enfants. En revanche, dans les cas conflictuels, la justice tend à favoriser les femmes : ses décisions reflètent l’inégale répartition des tâches entre les sexes dans le couple car bien plus souvent, ce sont les mères qui prennent en charge les jeunes enfants. Les choix de la justice heurtent une partie des pères, notamment ceux qui ont effectivement toujours partagé ces tâches.
Quel avenir pour le couple ?
Il y a d’abord la question de l’officialisation. Depuis 15 ans, l’union libre stagne. On peut imaginer que la plupart des couples qui s’installent dans le temps aient besoin au final d’établir une sorte de contrat officiel. Pour des raisons morales, des convictions religieuses pour certains, mais surtout pour des raisons pratiques. Les couples vivant en union libre ne bénéficient pas de l’imposition commune, ce qui désavantage très fortement ceux d’entre eux dont les revenus sont inégaux. Ils sont considérés comme étrangers en matière de succession ou de pension de réversion. La collectivité ne « reconnaît » fiscalement le couple et la solidarité qui existe en son sein que s’il se déclare comme tel.
Seule une individualisation complète des règles fiscales ou une reconnaissance par l’administration du couple de fait sur simple déclaration (comme c’est le cas au regard des enfants), pourrait relancer l’union libre. Le programme présidentiel prévoyait une possible imposition sur le revenu séparée, mais elle s’annonce complexe en pratique1. L’individualisation de l’impôt sur le revenu pose la question de la solidarité économique des partenaires du couple et du partage des ressources. Les couples où l’un des deux membres ne travaille pas seraient perdants à une imposition séparée puisqu’en divisant leurs revenus ils seraient imposés à des taux inférieurs.
Au-delà, la question qui se pose est celle de l’instabilité du couple : allons-nous vers des unions de plus en plus éphémères ? Cela ne signifierait pas nécessairement la mort du couple en soi, mais plutôt l’avènement d’une vie faite d’une succession d’unions. L’allongement de la vie élevant la probabilité de reformer un couple après une séparation2.
A l’inverse, va-t-on atteindre un plafond des ruptures ? Le nombre de divorces diminue, mais ce phénomène résulte de la baisse du mariage… Un tiers des personnes mariées en 1980 (nées environ au milieu des années 1950) avaient divorcé au bout de trente ans. Celles mariées en 1990 en sont presque à ce niveau après seulement 20 ans de mariage : on pourrait aboutir à 40 ou 45 % de mariages rompus pour ces générations. Cette évolution doit être nuancée. Pour les mariages prononcés depuis 2005, on assiste à une baisse de la part d’unions rompues après 5 ans. L’Insee signale de son côté une « légère » diminution du nombre d’enfants mineurs impliqués dans une séparation (toutes formes de couples confondues) depuis les années 2000. Ces signaux semblent indiquer que la « fragilisation » des couples n’est pas une tendance linéaire.
On peut imaginer que s’installent deux phases-types de la vie à deux : celle du couple à l’essai, qui se cherche, puis celle du couple qui pourrait être plus durable parce que testée auparavant. Pas forcément éternel, mais pas nécessairement destiné à être rompu. Comme l’indique l’Insee, si l’on considère les premières unions cohabitantes (toutes formes de couples confondues) beaucoup se joue dans les quatre premières années, avec une probabilité de rupture de 4 % par an, divisée par deux la sixième année. En tous cas, pour l’heure, aucune donnée ne permet de conclure à la fin du couple et à l’avènement de la vie en solo.
100 000 couples homosexuels On compte 100 000 couples composés de personnes du même sexe selon l'Insee (données 2011), soit 0,6 % de l’ensemble des couples. La proportion est plus forte chez les jeunes : c’est le cas de 2,2 % des couples âgés de 20 ans, mais de moins de 0,3 % des couples après 50 ans. Dans un cas sur dix, soit 10 000 couples, les personnes vivent avec des enfants. L'Insee a enregistré 10 000 mariages de personnes de même sexe en 2014, soit environ 4 % de l'ensemble des unions.
Notes: