A partir de quel niveau de revenu est-on riche ou pauvre, appartient-on aux classes « populaires », « moyennes » ou « aisées » ? Cette question, pourtant centrale, est très souvent laissée dans le vague. Pour le comprendre, il faut d’abord définir des classes de revenus. Nous utilisons ici la définition de l’Observatoire des inégalités. En bas de l’échelle, on trouve les catégories populaires dont les revenus sont compris entre 0 et 30 % des plus bas revenus. Ensuite, les classes moyennes se situent entre 30 % et 80 % des revenus. Les classes aisées occupent les 20 % supérieurs. Le seuil de pauvreté est fixé à la moitié du revenu disponible médian (après impôts et prestations sociales) et le seuil de richesse au double. Ensuite, nous observons les revenus perçus par type de ménage1.
Selon cette définition les personnes seules sont considérées comme pauvres si leur revenu disponible est inférieur à 800 euros mensuels (données 2017). Jusqu’à 1 300, elles appartiennent aux classes populaires et entre 1 300 et 2 300 euros aux classes moyennes. Elles sont qualifiées d’aisées au-delà de 2 300 euros et de riches au-dessus de 3 155 euros par mois. Pour les couples sans enfants, le seuil de pauvreté se situe à 1 550 euros. Ces couples appartiennent aux classes moyennes entre 2 500 euros et 4 500 euros et à la catégorie des riches au-dessus de 6 200 euros. Les couples avec deux enfants sont classés comme pauvres si leurs revenus sont inférieurs à 2 000 euros mensuels, comme classes moyennes entre 3 400 et 5 800 euros et riches au-delà 8 200 euros.
Ces limites sont discutables. Il s’agit de revenus après impôts et prestations sociales et non tel qu’ils sont déclarés (voir encadré). Le seuil de pauvreté est bas : le plus souvent, on utilise le seuil à 60 % du niveau de vie médian dans le débat public, non celui de 50 %. La définition monétaire des catégories populaires est restrictive : d’un point de vue sociologique, ces catégories comprennent l’ensemble des employés et ouvriers, qui représentent la moitié des actifs. Les catégories « aisées » rassemblent des ménages aux revenus très inégaux, de cadres supérieurs à des PDG de multinationales. Enfin, les données de l’Insee ne prennent en compte ni le niveau de patrimoine détenu, ni le coût du logement2 ou des transports, qui réduisent les niveaux de vie et sont très différents d’un territoire à l’autre. Il faudrait aussi distinguer encore plus précisément les types de familles, notamment le nombre d’enfants des familles monoparentales.
Le premier intérêt de ces délimitations est d’éviter de mélanger des revenus par personne avec ceux de ménages de types différents. Connaître le niveau de vie médian d’une personne n’est pas très parlant pour la plupart des ménages qui raisonnent globalement. Elles permettent ensuite de dresser les contours des différentes catégories de revenus (populaires, moyennes, aisées) à travers des ordres de grandeur pour tenter de sortir du flou qui persiste toujours dans le débat sur les revenus. Elles fixent enfin un seuil de richesse, grand absent du débat public. Le manque de travaux sur les outils de définition est fréquent en France dans le domaine des revenus : le brouillard permet à des points de vue très différents de ne pas être contredits par des faits, ce qui semble satisfaire la majorité… Il en résulte de nombreuses exagérations.
De quels revenus parle-t-on ? Ces données comprennent toutes sortes de revenus déclarés aux impôts : les salaires, mais aussi les revenus du patrimoine ou des indépendants par exemple. L’institut en retire les impôts directs (sur le revenu et impôts locaux) puis y ajoute les prestations sociales (comme les allocations logement). On mesure alors le revenu dit « disponible ». Nous utilisons ici les revenus par type de ménage. L'avantage c'est qu'ils correspondent aux revenus vraiment touchés chaque mois par chaque type de famille. L'inconvénient est qu'ils ne sont plus comparables entre types de familles : on ne peut plus dire qu'une personne seule qui touche 789 euros a un « niveau de vie » équivalent à celui d'un couple qui perçoit 1 550 euros comme l'Insee le fait par ailleurs3.
Notes:
- L’Insee ne donne pas l’ensemble des configurations, notamment une famille monoparentale a un niveau de vie très différent suivant le nombre d’enfants ↩
- Très difficile à intégrer dans la mesure où il faudrait savoir si la localisation du logement est subie ou choisie. ↩
- Le niveau de vie médian de l'Insee est une construction théorique qui repose sur un système d'équivalence entre ménages qui s'appelle les unités de consommation, une unité de consommation correspond fictivement à une personne seule, mais ce n'est pas réellement le revenu des personnes seules. ↩